Charlélie Couture


Comme un avion sans aile (extrait de l'album "poèmes Rock" 1981)

Comme un avion sans aile,
j'ai chanté toute la nuit,
j'ai chanté pour celle,
qui m'a pas cru toute la nuit

Même si j'peux  pas m'envoler,
j'irai jusqu'au bout,
oh oui, je veux jouer
même sans les atouts.

Tu fais semblant de regarder ailleurs,
tu dis même que j'te fais peur,
pourtant tu sais j'tiens plus d'bout,
aussi crevé qu'un danseur.

Oh, il fait lourd, grande, grande nuit blanche
grande grande nuit d'orage,
le tonnerre gronde
mais y'a pas d'éclair

Ecoute la voix du vent
qui glisse, glisse sous la porte,
écoute on va changer de lit, changer d'amour
changer de vie, changer de jour

Et même, même si tu fais plus rien,
tu vois moi j'aboierai encore…
mais tu t'endors sous mon piano,
quand je joue faux

Oh libellule,
toi, t'as les ailes fragiles,
moi, moi j'ai les ailes fragiles,
moi, moi j'ai la carlingue froissée
mais j'ai chanté toute la nuit.
 

Le fauteuil en cuir  (1981)

Combien de temps passé dans ce fauteuil en cuir
enfoncé défoncé, dans ce cuir tout déchiré
à regarder par la fenêtre les feuilles qui frétillent,
et puis ces grandes silhouettes sombres dans
la lumière froide

Combien de temps passé, à longer les murs
Combien de temps passé, à longer les murs

Combien de temps passé goutte à goutte sans arrêt
le robinet grippé goutte au dessus de la baignoire
trois quatre poils frisés sur le bord de l' émail
pourquoi tu mets des lunettes noires, devant le lavabo

Combien de temps passé, à longer les murs
Combien de temps passé, à longer les murs

Combien de temps passé complètement immobile
tuyauteries et borgorygmes, y'a de l'air plein les radiateurs
mais c'est pas clair non plus ailleurs
mâchouiller un chewing gum, le tirer, le remâcher
y'a plus de sucre dans la gomme, le tirer, le remâcher

Combien de temps passé, à longer les murs
Combien de temps passé, à longer les murs

Combien de temps passé, enfoncé défoncé
dans ce fauteuil en cuir qui pèle aux accoudoirs
à se torturer le cœur, le front dans les mains
parce que y'a rien qui vient
encore pas de lettre aujourd'hui
encore rien dans la boite

Combien de temps à se croire damné
Combien de temps passé sans même envie de manger
combien de temps passé à longer, longer les murs.
 

La balade du mois d'août 75 (extrait de "Pochette surprise" 1981)

On a loué une maison, pas très loin d'Avignon
à un vieux Polonais qui cherchait une mine d'or,
il faisait bon dès l'aurore, à regarder le ciel
dans un fauteuil en toile,
et les poules imbéciles et le coq d'opéra,
quand le café était prêt, une fenêtre s'ouvrait,
et la mère bonne humeur commentait un de ses rêves
j'ai les pieds gelés mais je me souviens du mois d'août 75

Tu tissais un gilet comme un stage d'artisan en maillot de bain du soir au
matin
tes frangins faisaient des sprints à vélo sur une route déserte,
on allait chercher du fromage de chèvre frais,
dans la ferme du haut
sur les chaises du jardin, le père barbu chauve pensait à Picasso,
la piscine était loin, mais ça faisait du bien
quand on arrivait,… quand on arrivait

On buvait du pastis comme si c'était de l'eau
tu voulais que je reste, tu voulais que je t'enlève
comme un premier amour
on jouait à la pétanque comme des amateurs,
mais y'à guère qu'un amateur pour cent mille navigateurs,
y'a un seul conteur pour cent mille baratineur,
j'ai des crampes dans le coup et les yeux qui me piquent,
mais je me souviens…

On écoutait le mistral souffler sur la plaine,
on faisait l'amour sur le toit en regardant les étoiles
y'avait rien à gagner les journées passaient
tout était simple,
on ne croyait plus en rien, en rien d'autre qu'à l'instant,
et ça jouait de la musique sur tous les sentiments,
pas d'intrigues de village, pas d'ambition,
juste une manière de vivre,
une manière d'être, je me souviens

Mais il ne reste jamais rien de ce qui est vécu,
quelques grains oxydés sur de la paraffine
et des souvenirs idiots mais qui donnent un peu de lumière
…les jours de pluie.


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